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Travail musculaire du cheval : les bases pour comprendre

Le fonctionnement musculaire du cheval est, comme chez l'homme, une merveille de la nature. Les différents types de fibres musculaires, aérobies et anaérobies, voient dans chaque muscle leur action se compléter pour permettre au cheval de fournir des efforts intenses et brefs (pour le CSO par exemple) ou soutenu et prolongé (pour la course ou l'endurance), selon le travail demandé. Comprendre ce fonctionnement permet de mieux gérer le travail musculaire du cheval, d'améliorer sa récupération et aussi d'adapter son alimentation pour lui permettre d'être au top de sa forme.

Fonctionnement du muscle du cheval 

L’appareil musculaire du cheval est composé, comme chez l'homme, de fibres musculaires de plusieurs natures, chacune correspondant à un type d’effort différent. Ces différents types de fibres musculaires sont alors sollicités ou « recrutés » par l’organisme du cheval en fonction de l’effort à fournir. Et, également comme chez l’homme, l’entraînement musculaire du cheval modifie avec le temps et la nature de l’effort demandé la proportion des différentes fibres pour adapter les muscles au travail fourni : un entraînement à des efforts brefs, intenses, récurrents (par exemple le CSO) développera chez le même cheval des muscles différents d’un entraînement long, d’intensité élevée sur une durée modérée (par exemple les courses) ou très prolongée (par exemple l’endurance). La race du cheval le prédispose aussi plus naturellement à un type d’effort plutôt qu’un autre en fonction de la répartition propre à cette race des différentes fibres musculaires.

Les fibres musculaires anaérobies : la force musculaire du cheval

Ces fibres sont les plus grosses et possèdent une vitesse de contraction très rapide. Elles permettent un effort de puissance et de sprint court. Ces fibres sont en grande partie responsables de la vitesse innée du cheval.

La combustion des glucides s’y effectue en quantité importante mais en l’absence quasi totale d’oxygène (on dit qu’il s’agit d’un effort anaérobie, « an » = sans et « aérobie » = oxygène). Le rendement énergétique de ces fibres est médiocre (pertes thermiques importantes). La combustion des glucides est incomplète et entraîne la production d’acide lactique qui s’accumule dans les cellules musculaires du cheval. Cet acide lactique est responsable des crampes et courbatures musculaires. 

Les fibres musculaires aérobies : l’endurance musculaire du cheval

Ces fibres sont peu fatigables mais leur vitesse de contraction est lente, ce qui limite l’intensité du travail fourni. Elles sont donc recrutées par l’organisme du cheval pour des efforts comme le pas ou pour un effort d’endurance.

Elles ont une grande faculté à utiliser l’oxygène (on dit alors qu’il s’agit d’un effort « aérobie », c’est à dire utilisant de l’oxygène). Leur rendement énergétique est bon : La combustion des substrats (lipides) est complète, sans déchet. L’utilisation des lipides plutôt que des glucides par les muscles entraîne une épargne des glucides, ce qui leur confère une forte aptitude à prolonger l’effort.

Les fibres aérobies alactiques : la résistance musculaire du cheval

Ces fibres sont intermédiaires entre les deux précédentes car elles se contractent rapidement, utilisent majoritairement la voie aérobie mais sont assez économes en glycogène. Elles utilisent en effet un mélange de glycogène et de graisses pour générer de l’énergie. Elles ont un bon métabolisme aérobie, c’est-à-dire qu’elles génèrent peu de déchets de combustion glucidique.

Le glycogène (ou glucose) permet en effet aux muscles du cheval de produire de l’énergie de façon aérobie deux fois plus rapidement que les lipides. Il est préférentiellement utilisé quand la vitesse augmente. La combustion des glucides est quasi complète, sans accumulation d’acide lactique.

Le rendement énergétique des fibres aérobies-alactiques est excellent (pertes thermiques modérées). Elles sont donc mobilisées par le cheval pour les efforts intenses prolongés, tel le sprint long. Ces fibres sont responsables de la tenue de la vitesse (ou résistance) et sont d’une importance primordiale chez le Pur-Sang anglais et le Trotteur Français qui parcourent des distances classiques de 2 500 mètres environ.

% de fibres musculaires Aréobies Aérobies-Alactiques Anaérobies Anaérobies et Aérobies-Alactiques
ENDURANCE FORCE RÉSISTANCE FORCE + RÉSISTANCE
Homme 62 34 4 38
Trotteur 21 52 27 79
Quarter Horse 9 51 40 91
Pur-sang anglais 11 57 32 89
Pur-sang arabe 14 48 38 86

D’après Snow et Valberg, 1994

Le travail musculaire du cheval en fonction de l’allure

Le travail au pas

Les muscles du cheval se contractent très lentement. Les fibres aérobies ( = endurance) du cheval sont recrutées en priorité et génèrent de l'énergie uniquement par la voie aérobie. À cette allure, les muscles brûlent principalement des graisses. Les réserves étant généralement abondantes et leur mobilisation et leur métabolisation assez rapides, elles suffisent à régénérer l'énergie consommée pendant la marche.

Le pas rapide est intéressant pour faire reprendre l'entraînement à un cheval en surcharge pondérale. Il est également bénéfique du point de vue du système ostéo-articulaire, non sollicité depuis un moment.

Le travail du pas et du galop

Les fibres aérobies seules ne peuvent se contracter assez rapidement pour propulser le cheval. Les fibres aérobies-alactiques sont alors recrutées pour permettre l’effort demandé.

Quelle est la conséquence pratique pour l’alimentation du cheval ?

Il faut apporter des glucides dans la ration, particulièrement sous forme d’amidon. En effet, l’amidon est une source énergétique de choix pour la synthèse de glycogène car sa digestion entraîne une augmentation de la glycémie et de l’insulinémie, deux des paramètres les plus importants impliqués dans la synthèse du glycogène.

Il faut aussi apporter une part de lipides dans la ration qui seront principalement utilisés les jours de « promenade » (vitesse lente à modérée). Ils permettent d’épargner en partie la réserve de glycogène musculaire du cheval pour les jours de travail intense.

Le travail prolongé au trot et le galop rapide

Les fibres anaérobies sont également recrutées. À cette vitesse, l’énergie produite par les fibres aérobies n’est plus suffisante. La combustion importante des glucides en l’absence d’oxygène (on appelle ça une glycolyse anaérobie) permet de générer suffisamment d’énergie pour maintenir la vitesse demandée.

La conséquence immédiate est la production et l’accumulation d’acide lactique qui fait chuter le pH intramusculaire, responsable de l’apparition de la fatigue musculaire (crampes).

Une notion essentielle : le seuil anaérobie ou seuil de fatigue

Quand la vitesse augmente, l’utilisation du glycogène musculaire augmente également. À partir d’une certaine vitesse, la production d’énergie ne peut plus être majoritairement assurée par la voie aérobie : le cheval atteint alors son « seuil anaérobie » ou « seuil de fatigue ». À partir de ce point, la voie anaérobie prend une part importante dans la production d’énergie, d’où l’augmentation exponentielle de l’utilisation du glycogène et de l’accumulation d’acide lactique : le cheval entre alors dans la « zone rouge ». Au delà, la fatigue musculaire chez le cheval se fait sentir rapidement : l’effort ne peut alors se poursuivre longtemps. L’augmentation brutale de la consommation du glycogène est causée par le recrutement de la voie anaérobie qui l’utilise avec un rendement énergétique 12 fois inférieur à celui de la voie aérobie. Il en résulte la production d’un déchet responsable de l’apparition de la fatigue musculaire : l’acide lactique.

Ces données ont été recueillies auprès de différentes races (moyenne). Notez que tant que le cheval reste en dessous de 39 km / h (1’27’’ au kilomètre), très peu de glycogène est utilisé. Cependant, plus la vitesse augmente, plus le cheval s’approche de son « seuil anaérobie ». À partir de ce point, la consommation de glycogène augmente de façon exponentielle.

Que retenir en pratique sur le travail musculaire du cheval 

Le seuil anaérobie :

  • Il est propre à chaque cheval : c’est le point à partir duquel il se met « dans le rouge ».
  • Plus le seuil anaérobie apparaît tardivement au cours de l’effort, meilleur est le cheval.

L’apparition de la fatigue est causée par l’accumulation d’acide lactique.

L’objectif de l’entraînement du cheval est de faire reculer ce seuil au maximum. Pour cela, il faut entraîner une conversion des fibres anaérobies en anaérobies alactiques.

Les grands principes de l’entraînement doivent donc être les suivants :

  • Travailler l’endurance : des exercices longs et lents qui améliorent l’efficacité cardio-respiratoire et biomécanique
  • Accroître la capacité aérobie : travailler à des vitesses inférieures mais approchant le seuil anaérobie
  • Renforcer la puissance aérobie (tenue, résistance) : travailler autour du seuil anaérobie
  • Stimuler la puissance anaérobie ou tolérance à l’acide lactique : exercices courts et répétés (intervalles) qui dépassent plus ou moins largement le seuil anaérobie

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